Page:Poincaré - Au service de la France, neuf années de souvenirs, Tome 6, 1930.djvu/83

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serve des projectiles, avec laquelle il a engagé la nouvelle offensive, commence à s’épuiser ; il ne veut pas la laisser tomber au-dessous de 400 coups par pièce. Si nous n’avons pas percé les lignes allemandes avant d’atteindre ce minimum, il renoncera, pour le moment, à continuer la bataille.

Au courant de la conversation, Étienne dit à Joffre : « Gallieni a vu Doumer et lui a reproché sa campagne contre vous ; il l’a supplié d’y mettre fin. Doumer lui a promis de cesser. Peut-être feriez-vous bien de remercier Gallieni, — Oui, répond Joffre, je le remercierai, je le sais loyal et je ne le rends pas responsable de la conduite de ses amis. »

Viviani et Millerand devant être entendus, le mardi 23, par la commission du Sénat, je les mets au courant de l’entretien que Bourgeois et Freycinet ont eu à l’Élysée avec Joffre. « Très bien ! » dit Millerand avec un sourire. « J’avais annoncé qu’avant peu Joffre serait convaincu qu’il avait lui-même réclamé la formation d’unités nouvelles, Quant à Viviani, il éclate : « Joffre veut faire croire que c’est par notre faute qu’échoue son offensive. Lorsqu’il l’a engagée, il savait très bien à quoi s’en tenir sur les fabrications. Il veut rejeter sur le gouvernement l’imprudence qu’il a commise. » Je m’efforce de calmer Viviani, dont les nerfs ne tardent pas à se détendre. Les deux ministres vont à la commission, et le président du Conseil me rapporte ensuite ses impressions, qui sont très favorables. Millerand, me dit-il, a été superbe. Cette fois, il n’est pas resté volontairement muet. Il a parlé d’abondance pendant plus d’une heure avec une clarté et une logique admirables. Il a fourni des chiffres précis sur les fabrications du début et sur celles d’aujourd’hui. Il a exposé les