Page:Poincaré - Au service de la France, neuf années de souvenirs, Tome 6, 1930.djvu/85

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a offert à l’Espagne le Portugal et Gibraltar. Le roi a écarté ces propositions captieuses. Il désire que je ne l’ignore point. Beaucoup d’Espagnols lui reprochent de laisser, par amitié pour la France, échapper une occasion favorable. Je confirme ce que Delcassé a déjà dit à M. Quinonès, que nous n’oublierons pas, après la victoire, l’attitude amicale du roi et de son peuple. Je remercie, en particulier, l’Espagne d’avoir bien voulu prendre sous sa protection les Français qui sont en Allemagne et spécialement nos prisonniers. Je signale à M. Quinonès que, d’après mes renseignements, ces malheureux meurent de faim. Chaque fois que l’ambassadeur d’Espagne à Berlin visite les camps, on s’arrange pour « camoufler » la vérité.

Dans la soirée du mercredi 24, Millerand me téléphone que, d’après un avis du quartier général, l’impression est bonne en Champagne ; mais, dès le jeudi matin, nous recevons des renseignements moins rassurants. Nous avons été contre-attaqués et nous n’avons pas maintenu la totalité de nos positions. Il semble bien qu’on ne puisse aboutir le soir même à une décision. Joffre fait maintenant savoir à Millerand qu’il n’arrêtera pas l’opération. Il a changé d’avis. Ces variations inquiètent le Conseil des ministres pour le présent et pour l’avenir. Il prie Millerand de demander à Joffre, aussitôt la bataille terminée, un rapport détaillé sur les causes de l’échec et sur les conséquences-Croit-on pouvoir percer dans une nouvelle offensive du même genre ? Faut-il renoncer à cet espoir ? Devra-t-on chercher une solution dans une manœuvre différente, attaque en masse, diversion par une armée de réserve, opération lointaine ? Ribot trouve que le gouvernement abdique trop ses prérogatives. Viviani répond avec un peu de