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Page:Poincaré - La Valeur de la science.djvu/13

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INTRODUCTION

Et pourtant je ne peux les séparer, et ceux qui aiment l’une ne peuvent pas ne pas aimer l’autre. Pour trouver l’une, comme pour trouver l’autre, il faut s’efforcer d’affranchir complètement son âme du préjugé et de la passion, il faut atteindre à l’absolue sincérité. Ces deux sortes de vérités, une fois découvertes, nous procurent la même joie ; l’une et l’autre, dès qu’on l’a aperçue, brille du même éclat, de sorte qu’il faut la voir ou fermer les yeux. Toutes deux enfin nous attirent et nous fuient ; elles ne sont jamais fixées : quand on croit les avoir atteintes, on voit qu’il faut marcher encore, et celui qui les poursuit est condamné à ne jamais connaître le repos.

Il faut ajouter que ceux qui ont peur de l’une, auront peur aussi de l’autre ; car ce sont ceux qui, en toutes choses, se préoccupent avant tout des conséquences. En un mot, je rapproche les deux vérités, parce que ce sont les mêmes raisons qui nous les font aimer et parce que ce sont les mêmes raisons qui nous les font redouter.

Si nous ne devons pas avoir peur de la vérité morale, à plus forte raison il ne faut pas redouter la vérité scientifique. Et d’abord elle ne peut être en conflit avec la morale. La morale et la science ont leurs domaines propres qui se touchent mais