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hypothèse de sir g. h. darwin

ne serait qu’une apparence due à ce que notre unité de temps, le jour sidéral, augmenterait peu à peu. Bien plus, l’effet des marées, loin de produire réellement une accélération du moyen mouvement de la Lune, augmenterait au contraire la distance de cet astre à la Terre et sa période de révolution, comme nous venons de le remarquer. N’est-il pas à craindre alors que ce retard effectif ne l’emporte sur l’accélération apparente ? Pour répondre à cette objection, Delaunay soutenait que le coefficient du retard imprimé à la Lune est moindre que celui du retard de la rotation de la Terre, ce qui se trouve être exact, semble-t-il. Mais, si l’on ne tient compte que du frottement des océans actuels sur leur fond, l’effet total est tout à fait minime et insignifiant. Il faudrait supposer que l’intérieur du globe terrestre n’est pas rigide, qu’il est plus ou moins visqueux, et que, par conséquent, les marées internes y produisent des frottements intenses.

II. — L’excentricité et l’inclinaison de l’orbite lunaire sont supposées nulles.

96.Quoi qu’il en soit, et pour en revenir au point de vue cosmogonique, on doit supposer, avec Sir G. H. Darwin, que dans ses états antérieurs la Terre était fluide et visqueuse. Elle a alors subi des marées dans toute sa masse (bodily tides), et les frottements dus à ces marées internes étaient incomparablement plus énergiques que ceux qu’on peut attribuer actuellement aux marées océaniques.

97.Nous nous proposons d’étudier de plus près les variations que subissent, du fait de ces marées, la distance de la Lune et la rotation terrestre.

Pour simplifier, nous supposerons tout d’abord que le plan de l’orbite lunaire coïncide avec celui de l’équateur terrestre et que cette orbite est circulaire. Il est bien clair que, par raison de symétrie, l’orbite restera alors indéfiniment dans le plan équatorial. Mais restera-t-elle toujours circulaire ? Montrons qu’il en sera bien ainsi et que, si l’excentricité est initialement nulle, elle le restera toujours. Soient la force perturbatrice perpendiculaire au rayon vecteur[1] et

  1. L’attraction de la Terre sur la Lune (fig. 25) se décompose en : 1o une force centrale presque égale à la force entière et donnant le mouvement képlérien, et 2o une force perturbatrice perpendiculaire au rayon vecteur.