Page:Poincaré - Science et méthode (Édition définitive).djvu/43

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résultats ; ce n’est pas là du pur dilettantisme. Qu’est-ce qui nous donne en effet dans une solution, dans une démonstration, le sentiment de l’élégance ? C’est l’harmonie des diverses parties, leur symétrie, leur heureux balancement ; c’est en un mot tout ce qui y met de l’ordre, tout ce qui leur donne de l’unité, ce qui nous permet par conséquent d’y voir clair et d’en comprendre l’ensemble en même temps que les détails. Mais, précisément, c’est là aussi ce qui lui donne un grand rendement ; en effet, plus nous verrons cet ensemble clairement et d’un seul coup d’œil, mieux nous apercevrons ses analogies avec d’autres objets voisins, plus par conséquent nous aurons de chances de deviner les généralisations possibles. L’élégance peut provenir du sentiment de l’imprévu par la rencontre inattendue d’objets qu’on n’est pas accoutumé à rapprocher ; là encore elle est féconde, puisqu’elle nous dévoile ainsi des parentés jusque-là méconnues ; elle est féconde même quand elle ne résulte que du contraste entre la simplicité des moyens et la complexité du problème posé ; elle nous fait alors réfléchir à la raison de ce contraste et le plus souvent elle nous fait voir que cette raison n’est pas le hasard et qu’elle se trouve dans quelque loi insoupçonnée. En un mot, le sentiment de l’élégance mathématique n’est autre chose que la satisfaction due à je ne sais quelle adaptation entre la solution que l’on vient de découvrir et les besoins de notre esprit, et c’est à cause de