Page:Poincaré - Sciences et Humanités, 1911.djvu/14

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de l’association des idées, les mouvements appropriés ; quand on nous dit, allez à droite, les muscles qui nous dirigent vers la droite se contractent tout seuls. C’est assez pour vivre.

Mais c’est déjà trop peu dans bien des cas pour la plupart des hommes civilisés ; c’est tout à fait insuffisant pour quelque chose d’aussi subtil que le raisonnement mathématique. Dans ce laminoir délicat, les phrases en bloc ne peuvent pas passer ; il faut lui présenter des matériaux moins grossiers, réduits pour ainsi dire en petits morceaux par l’analyse verbale.

Pour celui qui n’est pas exercé à cette gymnastique des mots, qui multiplie, ou que multiplie, ne représentent pas tout d’abord l’idée d’un pronom relatif au nominatif ou à l’accusatif, mais je ne sais quelle vague notion de multiplication ; de cette vague notion le mathématicien n’a que faire. On m’a dit que la langue chinoise (peut-être parce qu’elle est monosyllabique et n’a par conséquent pas de grammaire) est incapable d’exprimer certaines nuances délicates, celles que nous rendons par des flexions, et que faute d’un instrument leur permettant de raisonner avec précision, les Célestes sont et resteront fermés