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vii
préface

Ai-je dit que je ne pouvais rien ajouter à la peinture que fait M. Poirier des Métis et de leur chef ?… J’ai gardé mémoire d’une entrevue à laquelle les lecteurs des Arpents de Neige prendront peut-être quelque intérêt.

C’était le 20 juillet 1886, peu de temps après l’exécution de Riel. Je me trouvais avec quelques compagnons de voyage, au Manitoba, dans le village où vivait la mère du chef des métis. On nous avait dit que la malheureuse mère aimait à recevoir des Canadiens de la province de Québec, où son fils avait compté tant d’amis. Nous nous rendîmes chez elle. Nous savions que la douleur, parfois, la faisait divaguer, et nous voulions lui parler le moins possible de son fils ; mais, dès l’abord, elle se mit à nous dire sa peine…

Je notai ses paroles, et, je ne sais pourquoi, j’ai toujours gardé ces notes sténographiques. J’en donne aujourd’hui, pour la première fois, la transcription, en omettant tout ce qui, dans la conversation, n’est pas de Mme Riel.

Sans doute, il n’y a dans ces paroles sans suite, incohérentes, rien de remarquable ; le langage est fruste, parfois incorrect. Cependant, de les entendre de la bouche de cette vieille femme, ridée, voûtée par l’âge, mais ardente encore, et dont les yeux lançaient des éclairs ou se voilaient de larmes, c’était poi-