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Page:Poirier - Les arpents de neige, 1909.djvu/182

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l’enquête

En prononçant ces mots, le vieux François La Ronde avait un air si convaincu et si ravi que le vicomte ne put réprimer un sourire. Il partageait pourtant à bien des égards l’enthousiasme du trappeur pour le rebelle. Il avait vu, à plusieurs reprises, le « Faiseur d’Enclos » au camp Métis, à l’époque où Dumont harcelait la police montée du côté de Battleford avant la chute de Fort-Pitt, et cet homme l’avait frappé par son physique et ses allures. Maintenant que le nom de Poundmaker était sur toutes les lèvres, Henri se plaisait à retrouver dans son souvenir le chef sauvage tel qu’il l’avait aperçu un jour au milieu d’autres Indiens, à demi drapé dans sa couverture, avec sa longue chevelure noire qui lui tombait à la ceinture, tressée en plusieurs nattes ornées d’anneaux de cuivre et dont une mèche retroussée sur le front en forme de crête de coq donnait à sa physionomie sévère un caractère inoubliable de fierté… Une stature élégante et haute, une figure assez allongée pour un homme de cette race, faisaient de Poundmaker un de ces beaux types de Peaux-Rouges dont certains auteurs ont abusé dans leurs récits.

Toute sa personne révélait un chef, et, à en croire ceux qui l’avaient fréquenté, rien en lui n’était pour démentir ce titre.

Dès le début de la campagne, secondé par le Mosquito et le Faisan-Rouge, il s’était emparé de Battleford, dont les habitants et la garnison avaient dû se réfugier dans le blockhaus situé au confluent de la Saskatchewan et de la rivière Bataille. Il avait aussi dispersé les colons de Sainte-Angèle et fait prisonnier le directeur de cette mission, le