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Page:Poirier - Les arpents de neige, 1909.djvu/186

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l’enquête

bridée et si mal sanglée, le subtil métis, pris d’une défiance, fronça le sourcil :

— Hé là ! Pitre-le-Loucheux !

Pitre-le-Loucheux avait, certes, grande envie de faire la sourde oreille et de mettre son « bronco » à la plus vive allure ; mais il songea que Dumont avait à la ceinture un gros revolver américain qu’il maniait avec aisance. Il s’arrêta donc :

— Où va ainsi mon frère à cette heure matinale ? demanda le Bois-Brûlé.

— Je vais au sud, grand chef, espionner nos ennemis.

Tu as plutôt l’air d’un homme qui leur tournerait le dos, reprit Dumont, ironique. Depuis quand les guerriers partent-ils en expédition avec des brides mal mises et des montures mal sellées ? Mais il n’importe ! je suis très content de te voir, car j’avais à te parler.

Quoique plein d’inquiétude, le Cri demeurait impassible.

— Le vent est froid, reprit Dumont, et ma cabane est chaude. Nous y serons mieux pour nous entretenir. Que mon frère mette pied à terre et qu’il entre chez moi !

Une seconde, l’Indien parut hésiter. Mais le Bois-Brûlé, la main négligemment posée sur son étui à revolver, ayant répété doucement : « Que mon frère mette pied à terre », le Loucheux sauta à bas de sa monture et suivit le Sang-Mêlé.

La porte une fois refermée, Dumont fixa sur lui ses yeux vifs et noirs :

— Je désire quelques renseignements, dit-il. Mon