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présentations

veau venu s’éclaira. D’un mouvement preste, il ôta sa toque de fourrure. Charmé de l’effet produit par ses paroles, le vieillard ajouta, non sans un brin d’emphase :

— C’est M’sieu le vicomte Henry de Vallonges.

L’inconnu s’avança, la main tendue, et s’inclina avec aisance :

— Monsieur, dit-il dans le plus pur langage français, soyez le bienvenu parmi les Bois-Brûlés. Votre présence ici, surtout dans les circonstances actuelles, me fait un plaisir inexprimable. Je suis Louis Riel, président du Gouvernement provisoire de la petite France de la Saskatchewan.

Le jeune homme salua respectueusement à son tour le héros des Métis, l’homme dont la constance et l’énergie avaient déjà fait céder une fois le Gouvernement canadien.

Louis Riel avait quarante et un ans : il n’était pas très grand, replet, avec une figure ouverte aux lèvres rasées et dont une paire de favoris noirs accentuait encore la chaude pâleur. Rien, ni dans son teint, ni dans son aspect général, ne laissait deviner son origine indienne, sauf, peut-être, les yeux sombres et mobiles qui, dans sa face aux traits fatigués, brûlaient, par instants, d’un éclat fiévreux.

Une fois débarrassé de son capot de fourrure et d’un volumineux paquet qu’il tenait sous le bras, le chef des Bois-Brûlés avait pris place près du poêle, parmi les membres de la famille La Ronde, et la conversation tomba tout naturellement sur l’événement du jour.

— C’est un heureux début ! déclara Riel. Bien