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les arpents de neige

mais celui-ci lui apprit seulement que le cavalier s’était borné à réclamer avec insistance, en mauvais anglais, miss Clamorgan, se refusant énergiquement à remettre son billet en d’autres mains.

Quand le fermier, qui rentra une heure après, en eut pris connaissance à son tour, il dit d’un ton net :

— Si le porteur de cet écrit vient, pour son malheur, rôder de nouveau par ici, je lui enverrai une balle juste entre les deux yeux, et on n’entendra plus parler de cette sotte histoire. À supposer que les Indiens ayant brûlé Frog-Lake marchent sur le Fort-Pitt, — ce qui ne cadrerait guère avec leur façon ordinaire de guerroyer, — croyez-vous que l’un d’eux soit assez fou pour nous prévenir d’une façon désintéressée ?

L’argument semblait sans réplique, et miss Elsie avait d’ordinaire la confiance la plus absolue dans les avis de son père.

Cette fois, pourtant, elle ne se sentit pas entièrement rassurée et, durant le reste de la journée, elle épuisa, sans succès, toutes les hypothèses possibles au sujet du mystérieux message.

Sur le soir, un peu après la tombée de la nuit, le chien se reprit à aboyer avec force, et, presque au même instant, plusieurs voix se firent entendre dans la pièce voisine où se tenaient les gens de service.

Comme la jeune Anglaise ouvrait la porte, le vieux serviteur, un peu effaré, s’avançait pour appeler ses maîtres :

Miss, Elsie c’est un homme… un blessé…

— Un blessé ?