Page:Poirier de Narçay - La Bossue.djvu/106

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— Ah ! il va t’en donner de l’esprit ce brave Soutardier, s’écria Boulard.

Et le chanteur continuait :

Embrassez notre cœur, de vos feux.
De vos feux les plus doux.

La bossue ébaubie, plantée sur sa bonne jambe d’un côté et de l’autre sur sa béquille, hurlait :

— Ah ! ben, il est rien farce. Ça me rappelle ma première communion.

La mariée était montée dans un vieux briska avec son futur ; Beauvoisin, la demoiselle et le garçon d’honneur pénétrèrent à leur tour dans la voiture nuptiale, l’unique d’ailleurs.

Les Soutardier avaient escaladé leur tilbury, les autres les carrioles, tous endimanchés, redingotes trop courtes, chapeaux hauts de forme invraisemblables, cravates blanches extraordinaires.

Seul le docteur Boulard était encore à terre, occupé à découvrir son vieux cheval, dont la poitrine délicate demandait des ménagements. Il avait invité à prendre place dans son cabriolet, le greffier à conférences, Beaugoujat, qui pestait contre Joseph Soutardier.

— Comprenez-vous, monsieur le docteur, sa suprême inconvenance. Il y a des plaisanteries acceptables et d’autres qui ne le sont pas.

— Oui, je sais bien, mais pour ceux qui ont le caractère bien fait….

— Vous conviendrez cependant que cela dépasse les bornes.

— Alors vous concluez, insinua perfidement le praticien, que lorsque les bornes sont dépassées il n’y a plus de limites.

— Assurément, docteur.

— À moins qu’il n’y ait d’autres bornes un peu plus loin et celles-là franchies, d’autres encore.

Mais le greffier ne s’élevait jamais à ces hauteurs philosophiques et ne comprit pas. Il poursuivit cependant son idée :

— Ces cléricaux se complaisent à insulter la France