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Page:Poirier de Narçay - La Bossue.djvu/110

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J’aime bien les églises
Par les siècles surprises,
Et les nefs du vieux temps
Sur leurs gros piliers sales.
Et les trous attristants
Des dalles colossales.


Il crut utile d’apprécier lui-même son œuvre :

— Monsieur le juge de paix m’a dit beaucoup de bien des dalles colossales.

— Ça n’est pas une raison pour honorer de notre présence la petite comédie religieuse présidée par le calotin de Bray, fit observer Trouillard.

— Sans doute, répliqua Beaugoujat.

Et les deux hommes abandonnèrent la noce pour aller griller derrière le monument religieux quelques cigarettes.

Cependant un fait de nature à ébranler les convictions politiques de l’horloger se produisit. Le sectaire de la Libre-Pensée vit, ô puissance de l’habitude ! s’engouffrer sous la petite porte de l’église le ménage Giraud. La bossue, qui traînait son gosse cramponné à sa jupe, prit dévotement de l’eau bénite, présenta son doigt humide à son homme et tous deux firent le signe de la croix. Le marmot les imita.

— Tonnerre de Dieu ! s’écria Trouillard, regardez donc, Beaugoujat, regardez donc les Giraud. Certes voilà d’excellents soutiens de l’Athéisme !

— Mon cher, répliqua le greffier, il faut être indulgent pour les natures frustres.

— Tonnerre de Dieu ! je démontrerai tout de même à Courtamblaize la nécessité de rédiger une circulaire et plus tard un catéchisme à l’usage des Libres-Penseurs.

Quand la noce revint à la ferme de Pierrelaye, une heure sonnait à la vieille horloge de la cuisine, dont le fourneau surchauffé ronflait comme une forge.

Dans une marmite aussi colossale que les dalles de Beaugoujat, des litres et des litres de bouillon odorant lançaient autour du tuyau, rouge à sa base, des panaches de vapeurs.