Page:Poirier de Narçay - La Bossue.djvu/18

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’accouchement avait duré à peine quelques heures, suivant les prévisions nouvelles du médecin, lequel, après examen, avait changé d’avis.

— C’est un cas curieux, avait avoué Boulard, à ses clientes de la bourgeoisie qui s’étonnaient du phénomène. La nature est parfois bizarre dans ses exceptions.

Auprès des hommes il était plus explicite, malgré la discrétion médicale, bien connue ! ! !

Mais le secret professionnel n’est absolu que pour les clients riches. Et puis vraiment le cas était trop curieux pour ne pas être communiqué à l’Académie de médecine sous forme de mémoire où le phénomène était désigné par une initiale.

La relation était intitulée :

— Contribution à l’étude de l’accouchement dans les rétrécissements partiels du bassin.

Elle commençait ainsi très scientifiquement :

— Il nous a été donné d’observer dans notre pratique une femme G…

Il avait opéré des mensurations externes et internes ; mais les conclusions du rapport n’étaient pas très claires. Il résultait de cette étude que le rétrécissement était infinitésimal et qu’il n’existait peut-être pas du tout ; ce qui démentait totalement le titre de la brochure.

Mais cela importait peu vraiment : ce travail qu’il avait distribué aux fortes têtes de la localité avait orné son front d’une auréole. On disait couramment à Beaumont-le-Roger :

— Notre savant docteur a fait une communication des plus intéressantes à l’Académie de médecine.

Cela le posa aussi près des confrères, en ce sens qu’ils n’osèrent plus refuser de l’appeler en consultation, tout en pensant très naturellement qu’ils étaient plus forts que lui. Et l’escarcelle de Boulard s’arrondit assez pour lui faire dire après Beauvoisin :

— Une bosse, décidément ça porte bonheur.

Or, ce qui cause le bonheur des uns fait souvent le