Page:Ponson du Terrail - Le Bal des victimes.djvu/112

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— Le loup est allé tomber à cent pas dans un fourré…

— Ça se peut bien…

— Un fermier passait par-là avec son chien, sa vache et son mulet.

— Ah ! bon ! dit le Bouquin.

— Et il a ramassé le loup mort que le chien avait éventré, l’a placé sur son mulet et l’a emporté…

— Dam ! fit le gamin, une patte de loup, ça se paye quinze francs à Auxerre.

— Et ce fermier, c’est ton père.

— Ah ça, dit le Bouquin, en regardant de nouveau le capitaine avec défiance, vous êtes donc sorcier, vous ?

— Ça se peut bien, répondit le capitaine, se servant de la locution du gamin.

— Et vous croyez que mon père vous rendra le loup ? Est-ce qu’il est à vous ? Le loup est à celui qui l’a trouvé… Ça vaut 15 francs sans compter la peau… Avec la peau on donne du lard, des œufs, des pommes de terre… Moi, je ne rendrais pas le loup…

— Mais c’est moi qui l’ai tiré ? dit Henri.

— Bah ! vous l’avez manqué, possiblement.

— Mais puisqu’il est mort…

— Ça ne prouve rien… il fait si froid… Et puis, on dit qu’il y a une maladie sur les loups… Ça s’est vu !

— Allons, petit drôle ! dit le capitaine impatienté, marche devant nous et tais-toi, ou je te tire les oreilles. Ce n’est pas à toi, mais à ton père que nous réclamerons le loup…

La menace du capitaine ne produisit pas grand effet sur l’esprit sceptique et railleur de Bouquin.