Page:Ponson du Terrail - Le Bal des victimes.djvu/114

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La lune, qui était dans son plein, resplendissait sur la terre blanchie.

À sa clarté, on apercevait un vallon couvert de neige, abrité par des coteaux rocheux et boisés.

Au milieu des terres disparues sous leur blanc linceul se dressaient les murs gris de la ferme qui se divisait en trois corps de bâtiments : — un qui était l’habitation du fermier ; l’autre qui était destiné à engranger les récoltes ; le troisième qui comprenait les étables et les écuries. La ferme du père Brulé appartenait comme fond de terre au chef de brigade Solérol, depuis son mariage avec mademoiselle de Bertaut des Saulayes. Avant la Révolution, elle faisait partie des vastes domaines que possédait la famille de Bertaut, une des plus riches de la basse Bourgogne.

La famille Brulé tenait cette ferme à bail depuis plus de cent ans. Le père Brulé actuel qui était un fort brave homme, l’avait achetée en 1793, pour trente mille francs d’assignats. À l’avénement du Directoire, il l’avait rendue à mademoiselle de Vernières, qui avait épousé le chef de brigade.

Cette ferme, une des plus vastes du département, ne contenait pas moins de huit cents journaux de terre, prés ou bois.

On l’appelait la Ravaudière.

Le Bouquin la montra du doigt et dit :

— Tenez, v’ilà la fumée du père Brulé, il se chauffe. Prenez la sente que voilà.

Sente, en bourguignon, veut dire sentier.

-Prenez la sente que voilà, elle est marquée, les bœufs