Page:Ponson du Terrail - Le Bal des victimes.djvu/118

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III

Tandis que Bouquin se dirigeait vers le Trou à Renards, au travers des broussailles, tandis que M. Henri de Vernières et son ami le capitaine Victor Bernier s’acheminaient vers la Ravaudière, la mère Brulé et son fils Sulpice étaient seuls dans la cuisine de la ferme. Sulpice était assis devant le feu qui flambait joyeusement, et il fumait silencieusement sa pipe.

La mère Brulé rangeait le vaisselier et disposait sur une longue table de chêne les assiettes de terre rouge et les cuillers d’étain destinées au souper des gens de la ferme qui allaient bientôt venir.

Les garçons de charrue faisaient la litière à leurs chevaux, le pâtre tirait de l’eau au puits creusé dans la cour.

Le dindonnier dormait dans l’étable. On attendait, pour souper, le père Brulé qui était allé au marché de Mailly-le-Château, et Bouquin qui vagabondait on ne savait où.

La mère Brulé accomplissait sa besogne accoutumée, en soupirant.

C’était une femme qui n’avait guère plus de quarante-deux ans. Elle avait été belle et en conservait des traces fugitives ; mais ses joues amaigries et ses yeux rougis par les larmes disaient éloquemment de longues et cruelles douleurs concentrées, étouffées sans murmure.