Page:Ponson du Terrail - Le Bal des victimes.djvu/150

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— Eh bien ?

— Qui dit Morvandiau dit un honnête homme. Nous n’avons qu’un défaut, nous sommes braconniers.

— Ah ! vous en convenez ?

— Pardieu ! fit naïvement Brulé. Ce qui ne nous convenait pas, du temps du roi, c’était de ne pouvoir tuer un lièvre, un chevreuil ou un sanglier sans courir le risque d’aller en prison. Alors, dam ! quand ou a dit qu’il n’y avait plus de nobles, et lorsque les nobles ont pris la fuite, les paysans ne se sont pas privé de mettre le gibier à sac et de tout exterminer.

D’ailleurs, comme on guillotinait à Auxerre, les nobles étaient partis.

Mais on ne leur aurait pas fait de mal, allez !

— Peuh ! qui sait ? fit le capitaine.

— Voyez M. Henri, plutôt… continua Brulé. Il est resté ici tout le temps, lui et personne n’a songé à le dénoncer.

— Cela est vrai, dit Henri, je dois avouer que les gens de ce pays se sont montrés peu enthousiastes de la Révolution.

— Moi, dit Brulé, je sais bien une chose, c’est que nous avons tous eu un regret.

— Lequel ? demanda le capitaine.

— C’est que M. Henri n’ait pas épousé sa cousine mademoiselle Hélène.

— Tais-toi, dit brusquement Henri.

Et il passa la main sur son front comme pour en chasser un pénible souvenir.

Sulpice rentra tandis qu’on causait.