Page:Ponson du Terrail - Le Bal des victimes.djvu/151

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Le valet de charrue et les gens de la ferme s’étaient levés un à un, leur souper fini, et souhaitant le bonsoir au maître, s’en étaient allés se coucher.

— Allez, mes enfants, leur avait dit le père Brulé d’un ton paternel, allez vous reposer et demain soyons de bonne heure à l’ouvrage : nous battrons du blé en grange, puisque la neige nous empêche d’aller aux champs.

— Eh bien ! et ta vache ? dit-il à Sulpice en le voyant entrer et venir se rasseoir à table.

— Elle est sur la litière et n’a pas bougé, répondit Sulpice un peu troublé.

La mère Brulé ne tenait pas en place. Elle mangea peu, et comme le fermier demeurait volontiers à table, elle dit à son mari :

— Maître, je vais aller préparer les chambres de ces messieurs, là-bas, dans le corps du bâtiment aux fourrages.

— Ah çà, fit le capitaine, est-ce que décidément nous couchons ici ?

Henri sortit sur le seuil de la porte :

— Il le faut bien, dit-il ; voici la neige qui recommence à tomber. Nous nous en irons demain matin.

— Ta sœur ne sera pas inquiète ?

— Nullement ; elle est habituée à de semblables absences.

Le bâtiment des fourrages, comme disait la mère Brulé, était justement celui où elle avait caché sa fille.

Les étables étaient d’un côté, les granges de l’autre ; au-dessus, entre les greniers à foin, on avait ménagé trois chambres, dont deux étaient contiguës et se commandaient.