Page:Ponson du Terrail - Le Bal des victimes.djvu/16

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— Vous l’avez vu ce soir ?

— Tout à l’heure.

— Et c’est lui qui vous a prévenue que je vous prendrais avec moi ?

— Oui, madame.

Tandis que Marion et madame Tallien causaient ainsi, le carrosse roulait bon train, gravissait le faubourg Saint-Antoine, et sortait de Paris par la porte de Charenton.

Il y avait un poste de garde civique à cette porte.

Les postillons s’arrêtèrent un instant, et l’officier qui commandait la garde civique s’approcha du carrosse, adressant cette question d’usage

— Où allez-vous, citoyennes ?

— À Grosbois, répondit madame Tallien, qui échangea un regard furtif avec l’officier.

— Pardon, citoyenne Tallien, reprit le chef du poste, vous êtes si bonne que vous ne refuserez point de venir en aide à un pauvre diable.

— Quel est-il et que puis-je faire ?

Tandis que l’officier parlait, un homme était sorti du poste, et s’approchait du carrosse. Madame Tallien l’enveloppa d’un coup-d’œil unique, étouffa un léger cri, et se mordit les lèvres pour ne point laisser échapper un nom.

L’officier ajouta :

— C’est un pauvre diable de cuisinier employé chez le citoyen Barras et qui s’étant attardé à Paris, ne sait plus comment faire pour retourner à Grosbois ; il craint de perdre son emploi, et si vous étiez bien bonne, citoyenne…

— Je le prendrais sous ma protection, n’est-ce pas ?