Page:Ponson du Terrail - Le Bal des victimes.djvu/268

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— Ouvre, te dis-je, je ne crains rien…

Marion sortit, et deux minutes après, elle introduisit le capitaine Solérol.

La camériste de Lucrèce ne s’était point trompée. Le capitaine marchait en zig-zag, et son odieux visage violacé témoignait de copieuses et récentes libations.

Il salua Lucrèce d’un air amical et lui dit :

— Ma petite, comme je sais que le marquis n’est pas ici, je viens causer avec toi.

La Lucrétia fit un geste de résignation. |Je suis un peu gris, continua le capitaine, qui se plaça à califourchon sur une chaise ; mais in vino veritas ! et je suis décidé à te raconter toutes nos affaires, au marquis et à moi.

Bernier, immobile derrière le paravent, devint attentif.

Solérol continua :

— Le marquis est une canaille ! moi aussi. Il veut sauver la reine… il m’a acheté pour cela… moi qui suis capitaine au service de la République.

— Ah ! fit Lucrèce avec dédain, il vous a acheté ?

— Oui.

— Pour beaucoup d’argent ?

— Non, il m’a permis de te faire la cour ; comprends-tu ?

— Vous me faites horreur ! dit-elle.

— C’est possible, mais voici la chose. Le marquis cherchait un homme pour sa conspiration, un homme qui, à un moment donné, trahît la République. Je t’avais suivie dans la rue, un soir, j’étais fou de toi… Le marquis m’a dit : « C’est ma maîtresse… mais comme j’ai besoin de