Page:Ponson du Terrail - Le Bal des victimes.djvu/38

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— Eh bien ! lui dit Cadenet qui prit un pot de vermeil et versa de l’eau dans une aiguière de métal, que penses-tu de mon entrée ?

— Georges… Georges… murmura Marion en joignant les mains, vous voulez donc mourir, vous aussi…

— Bah ! je ne crains rien.

— Prenez garde ! balbutia-t-elle avec une terreur croissante, la révolution n’est pas finie. On danse partout et je vends des fleurs, mais il tombera bien des têtes encore.

— Bah ! la mienne est solide…

— Il disait cela, lui aussi, murmura Marion…

Cadenet vit une larme rouler sur la joue pâlie de la jeune fille.

— Pauvre Marion ; dit-il ; mais va, l’heure de la vengeance est proche, et nous le vengerons, lui.

— Oh ! j’ai peur… j’ai peur… dit encore la bouquetière.

— Soit, mais obéis.

Ces trois mots furent prononcés par Cadenet avec un mélange de bonté et de fermeté.

On sentait, à l’accent de sa voix, qu’il était le maître absolu de cette femme.

Marion courba la tête :

— Que faut-il faire ? demanda-t-elle avec soumission.

— On danse demain, là-bas.

— Ah ! fit Marion frémissante.

— Et j’y voudrais conduire un homme qui ne s’attend pas à être invité.

— Et… cet homme ?

— C’est Barras.