Page:Ponson du Terrail - Le Bal des victimes.djvu/68

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— Peut-être…

— Eh bien ! fit ironiquement le directeur, voyons ?

— Le roi Louis XVIII, dit l’homme masqué, fera le comte de Barras pair de France et lieutenant-général.

— Bon ! après ?

— Il lui constituera, sur sa cassette, une pension de trois cent mille livres.

— Un joli denier, ricana Barras.

— Et lui conférera le titre de duc.

— Fort bien. Maintenant, pour mériter toutes ces faveurs, que dois-je faire ?

— Rendre la France au roi.

Barras demeura silencieux un moment, et ce silence fit palpiter d’espoir tous les cœurs.

Mais cet espoir fut de courte durée, car le directeur reprit :

— Messieurs, je suis très-reconnaissant à mes anciens amis d’avoir songé à moi, mais je suis bien plus reconnaissant encore à ma conscience de ne point m’abandonner en un tel moment.

Et comme ces mots excitaient quelques murmures, le directeur continua :

— Vous avez bien fait, messieurs, de me rappeler que j’étais gentilhomme ; car un gentilhomme ne trahit jamais ses serments. J’ai juré fidélité à la République ; la France a mis le pouvoir en mes mains, après l’avoir ôté à des hommes souillés de sang, je ne trahirai ni la République ni la France !

Ces paroles produisirent une vive agitation parmi les hommes masqués.