Page:Ponson du Terrail - Le Bal des victimes.djvu/69

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Mais Barras élevant la voix :

— La France, dit-il, a cessé d’être une monarchie, la France est un État républicain. C’est à elle et non à moi, qui ne suis que son mandataire, de voir s’il y a lieu de changer cet ordre de choses. Vous m’avez traîtreusement enlevé de chez moi, vous m’avez amené ici, vous avez employé toutes les séductions avant de passer aux menaces ; je suis incorruptible aux unes, je méprise les autres. Encore une fois, sortez vos poignards du fourreau.

— Ainsi donc tu refuses ? dit Cadenet.

— Je refuse !

— Prends garde ! dit Machefer

— Prends garde à toi, plutôt, malheureux, qui conspire, dit Barras.

L’homme masqué reprit la parole :

— Citoyen directeur, dit-il, songez que c’est votre arrêt de mort que vous prononcez.

— Messieurs, dit froidement Barras, j’ai servi le roi comme vous, mais je l’ai servi quand c’était mon devoir. Au siège de Madras, j’ai su montrer à mes compagnons d’armes que je ne reculais point devant la mort. Cessez donc vos menaces, elles sont injurieuses pour moi.

Machefer et Cadenet courbèrent la tête. — Nous ne servons plus sous les mêmes drapeaux, acheva Barras, — le vôtre, pour le moment du moins, se nomme la rébellion.

Misérable ! murmurèrent dix voix.

— Le mien, dit froidement Barras, est celui que s’est donné la France !