Page:Ponson du Terrail - Le Bal des victimes.djvu/97

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— Faut jurer de rien, monsieur Henri… ça pourra venir…

— Bah ! dit le comte, la Révolution m’a fait si pauvre, qu’il n’y a pas grand’chose à brûler chez moi. Les incendiaires, en admettant qu’ils existent, ne brûlent pas pour l’unique plaisir de brûler…

— Oh ! dam, ça c’est certain, dit Jacomet.

— Ils brûlent pour vous piller… et, ma foi ! quand ils nous auront pris, à ma sœur et à moi, quelques couverts d’argent et quelques louis…

— C’est toujours ça, dit Jacomet. Le fermier de la Fringale n’était pas riche : on l’a brûlé tout de même.

— Dis donc, Jacomet, fit le comte Henri, sais-tu le plus court chemin pour aller à la ferme du bonhomme Brulé ?

— Oui, monsieur.

— Tu devrais bien nous y conduire. Je veux avoir mon loup.

— Mais, monsieur, dit Jacomet, il y a une bonne lieue sous bois, et il fait froid.

— Nous soufflerons dans nos doigts.

— Et puis ça vous éloigne joliment de chez vous… deux lieues au moins.

— Brulé nous prêtera des chevaux.

— C’est drôle tout de même ! murmura le bûcheron d’un ton gouailleur, vous aimez fièrement le bonhomme Brulé, monsieur Henri. Enfin, ce n’est pas mon affaire.

Pour la seconde fois l’officier regarda le bûcheron.

Celui-ci baissa les yeux.

— Allons ! dit le comte Henri, prends ta peau de bique, Jacomet, et montre-nous le chemin. Adieu, petite.