Page:Pontmartin - Nouveaux Samedis, 19e série, 1880.djvu/17

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M. CAMILLE ROUSSET 5

croyait devoir rappeler à une génération oublieuse que l’Afrique avait préparé la Crimée, qu’elle avait endurci aux fatigues, acclimaté aux intempéries, familiarisé au péril, initié à tous les secrels de la grande guerre, les colonels de 1840, devenus les généraux de 1854. Et pourtant, à présent que la distance rétablit les proportions, éclaire les vrais points de vue et fait une plus juste distribution de lumière et d’ombre, à présent que nous sommes, hélas ! renseignés par l’adversité, qui pourrait hésiter entre Alger et Sébastopol ? D’abord, le premier inconvénient de la guerre de Crimée était d’infliger à la fameuse gasconnade, datée de Bordeaux : « L’Empire, c’est la paix ! » un prompt démenti qui, malheureusement, devait être suivi de plusieurs autres. Au lieu de prouver, comme en 1830, à l’Angleterre, qu’on ne la craignait plus, on s’aliénait, à son profit, une puissance que les politiques les plus sages ont toujours désiré voir devenir ou rester notre alliée ; désormais tout ce que l’on pouvait en attendre, dans les jours d’épreuve, c’était une neutralité compatissante, mais absolue. On dépensait inutilement des millions dont la déroute donnait d’avance le signal à des milliards. Aujourd’hui, le plus grand éloge qu’il soit possible d’accorder à cette guerre, c’est de reconnaître qu’elle n’a été ni fatale comme celle d’Italie, ni insensée comme celle du Mexique, ni néfaste comme celle de 1870, mais simplement dangereuse, dispendieuse et stérile. Voyez, an contraire, la