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judiciaire, des monnaies et des autres droits de souveraineté, — les comtés du Maine et de l’Anjou, les châtellenies de Château-du-Loir et de Chantoceaux. Il l’en investit le jour mêmeEn duché-pairie en érigeant par nouvelles lettres patentes[1] le comté d’Anjou en duché-pairie. Le nouveau duc allait hériter, en 1380, par l’adoption de Jeanne de Naples, les droits de la première maison d’Anjou-Sicile, et acquérir en 1375 et en 1383, par contrats en règle, d’autres droits à peu près imaginaires sur les successions de Majorque et du Roussillon, sur l’Achaïe, Tarente, la Morée, même sur l’empire de Constantinople. Son fils et son petit-fils s’épuisent après lui en conquêtes vaines, et Louis III, mort sans enfants, laisse à son frère René, avec tous ses domaines de France, cette ardeur stérile, qui pendant de longues années le devait tenir éloigné de l’Anjou et ne l’y ramener qu’à bout de forces plus encore que d’espérances.

Il semble tout au moins que la réunion première à la France de ce « bon pays et gras d’Anjou », lui ait été propice, en l’abritant pendant près d’un demi-siècle à l’écart des grandes guerres. Même en 1229 une émigration des étudiants et des maîtres de l’Université de Paris s’y réfugie et apporte un élément de vie nouveau et plus actif aux études de l’école épiscopale. Le séjour aussi plus fréquent des rois multiplie les fêtes et le premier courant même de la chevalerie angevine vers l’Orient crée une animation d’abord bienfaisante qui en renouvelle les nobles familles avant de les décimer. Les campagnes se repeuplent, et les défrichements, poussés avec ardeur, surtout dans la vallée, qu’une levée désormais rassure, et dans la quinte d’Angers, où la chasse est rendue libre aux citoyens (1321), transforment le pays. Mais l’insuccès constant de tant d’entreprises lointaines entraîne bientôt les princes aux exactions, à l’heure surtout des premiers troubles de guerre, qui du moins s’arrêtent et Guerres anglaises.les retiennent en Guyenne, en Provence, dans les Flandres. Malheureusement la paix même du pays y attire le recrutement des armées qui marchent contre la Bretagne, infatigable ennemie, et les retours sans fin des pillards débandés. — En novembre 1348 éclate en ville la peste noire, qui fait rage dans tout l’Anjou durant près d’un an[2], prélude des désastres de Crécy, de Poitiers. Pendant que le duc Louis guerroie en Guyenne, Robin Canolle, avec ses Anglais, court l’Anjou en proie à trois bandes, qui l’assaillent du nord, de l’ouest, du midi. En 1355 l’une d’elles s’installe dans l’abbaye du Louroux et y demeure pendant quinze ans ; — en 1356 Henri de Lancastre se voit fermer le passage des Ponts-de-Cé et est obligé de rebrousser chemin vers la Bretagne ; — en 1369 Cressewell et Calviley, repoussés de Saumur, prennent pied à St-Maur, pendant que d’autres compagnies occupent Beaufort, jusqu’à l’approche de Duguesclin, vainqueur à Pontvallin, qui dégage à force d’épée et aussi à prix d’argent le pays. Les dernières années du XIVe siècle, les premières du XVe siècle s’annoncent pourtant plus clémentes. La cour d’Anjou réside au château d’Angers. Charles, comte du Maine, y meurt le 19 mai 1404 ; Renéy naît le 16 janvier 1409. La guerre fait rage à distance et, quand elle se rapproche il semble que la fortune subisse une loi nouvelle. Le duc de Clarence en 1420 vient de se faire tuer avec sa noblesse dans la vallée du Vieil-Baugé et le cœur de la France en tressaille d’un espoir depuis longtemps inconnu. En 1422 c’est le tour de lord

  1. Les deux actes sont au registre Arch. nat. P 13341. Le premier est publié intégralement par Lecoy de la M., II. 204-206.
  2. V. La Peste noire en Anjou, dans la Rev. d’Anj., 1854, t. I, p. 82-96, art. du Dr  Farge.