Page:Potvin - L'appel de la terre, 1919.djvu/132

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

travaux de construction du moulin allaient commencer au printemps.

Dans les villages, on est toujours un peu âpre au gain ; l’établissement d’une industrie suscite toutes sortes de convoitises ; on rêve alors d’expropriations payantes et de grasses indemnités. On trace des plans et l’on s’ingénie à conduire la fortune par le plus long chemin, dans ses potagers ou au milieu de ses champs ; chaque habitant détermine que sa position est la meilleure pour le succès de l’industrie projetée.

Mais, cette fois, il n’y avait pas de doutes ; tous les habitants de la paroisse étaient sûrs que l’on allait faire des propositions au père Duval dont la terre jouxtait précisément le bas de la chute.

Et dans son for intérieur, sans avoir l’air d’y toucher, le père Duval, gagné par l’exemple des autres, s’était mis lui aussi à faire des calculs.

Les arpenteurs firent une dernière visite à Jacques Duval, puis partirent. Il y eut plusieurs jours de tranquillité relative.

C’est alors qu’un soir, dans la grande cuisine de la ferme Duval, on apprit, par le postillon, la nouvelle attristante du départ de Paul pour Montréal. Ce fut une minute pénible dans la famille. Le père ne dit pas un mot, mais il semblait avoir pris une résolution subite et énergique. La construction des moulins allait le sauver de la ruine et atténuerait sa peine. André devint sombre ; il devina les projets de son père et il soupira. Il jeta un long regard par