Page:Potvin - L'appel de la terre, 1919.djvu/183

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dit plus que par bouffées subites et courtes ; puis, un grand silence se fit dans la campagne. La tempête prenait fin en même temps que l’on finissait les croquignoles.

Alors on entendit passer au-dessus du village des notes à la fois joyeuses et graves ; c’était le premier coup de la messe de minuit, l’appel de la cloche qui laissait chanter mystérieusement, dans l’air purifié, son âme de bronze… Sur la route blanche, dans la nuit remplie de clartés stellaires, à travers la campagne ajourée, piquée d’arbres sombres et de taches confuses qui sont des maisons, on entend maintenant, de tous côtés, des grelots et le grincement des traîneaux sur la neige sèche. Les gens se rendent d’avance à l’église afin d’avoir le temps d’aller à confesse et de se préparer à la communion de la Nativité. Le village est silencieux malgré l’animation inusitée qui y règne à cette heure… Un bout de phrase qui arrive par saccades, le trille joyeux d’un enfant, le jappement d’un chien, un « woh ! woh ! arrié don » à la porte de l’église… et c’est tout. Par ci par là, dans le village, une porte qui s’ouvre trace une raie lumineuse sur la neige du chemin et des ombres se dirigent de plus en plus nombreuses vers l’église aux vitraux illuminés…

La mère Duval tenait beaucoup à aller à la messe de minuit, mais il y avait la maison à garder et le réveillon à préparer ; oh ! il serait modeste, cette année, le réveillon, parce qu’il devait être triste ; mais on réveillonnerait quand même. Jeanne, un peu lasse, s’offrit à rester. Son père viendrait, après la messe