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LE FRANÇAIS

construire au milieu de la terre pour recevoir le grain et le foin des pièces d’en haut. À cause de la sécheresse, les granges étaient, cette année, moins remplies que de coutume. Le grain était beau et les épis pleins, mais la paille était courte et le rendement du foin était de quarante pour cent de moins que l’année précédente. André Duval rappela qu’il avait eu peur de ne pas avoir assez de paille pour nourrir ses vaches et ses moutons durant l’hiver. Il avait d’abord pensé vendre au rabais quelques-unes de ses vaches et il confia à son ami ce que ça lui aurait coûté de désorganiser son troupeau qui comprenait quinze bonnes vaches laitières de première race.

« Quinze bonnes vaches laitières, tu sais c’que ça peut rapporter ? » disait-il, « et ça peut pas se renouveler tous les ans, ça. On met au moins trois ans à refaire un troupeau brisé. J’ai donc décidé d’garder toutes mes vaches. »

— Mais tu vas les nourrir avec quoi, tes vaches, jusqu’au printemps ? demanda Jean-Baptiste Morel.

— Encore là, Jean-Baptiste, j’vas te répondre qu’on peut toujours en apprendre et qu’il faut pas sans cesse se fier à soi. Tu te rappelles qu’au mois d’août, le curé a lu en chaire, une lettre du ministre de l’Agriculture de Québec rapport à la sécheresse. Le ministre demandait aux habitants de pas s’presser d’vendre leurs vaches à cause du manque de fourrage. Il nous disait qu’la récolte de patates allait être bonne et il conseillait de pas vendre nos patates à sacrifice mais de les donner à nos vaches, pendant l’hiver, à la place du four-