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Page:Potvin - Le Français, 1925.djvu/203

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LE FRANÇAIS

qu’à ce qu’il disparut dans un petit bois de bouleaux qui traversait le Rang, ils apercevaient les maisons dont quelques-unes étaient à demi cachées derrière des rideaux de saules et de bouleaux, toutes solidement assises, face au ciel. Elles paraissaient fortes, sûres de leur destinée. Le soleil faisait au loin briller leurs fenêtres en même temps qu’il couvrait les cimes des arbres d’une poussière d’or roux.

Enfin, André Duval exprima, tout haut :

« Vois-tu, Jean-Baptiste, ce qu’il faudrait à Jacques, ce serait de se marier par ici. C’est le mariage avec une bonne fille d’habitant d’par chez nous qui l’attacherait pour tout de bon à la terre ».

Puis, sans avoir l’air d’y toucher, clignant un œil malin du côté de son ami, il continua :

« À c’propos-là, j’sais que Jacques fait de l’œil depuis quelque temps à ta fille et il en parle souvent. J’crois que ce serait une bien bonne affaire, hein ?… Qu’en penses-tu, Jean-Baptiste ?… »

Jean-Baptiste Morel se sentit pris un peu au dépourvu devant la tournure soudaine que venait de donner André Duval à la conversation, et il ne put répondre d’abord… Si c’était une bonne affaire !… Ah ! ce n’est pas lui qui en doutait. D’abord, il fut tout heureux d’apprendre que ce projet de mariage était aussi agréable à son ami qu’à lui-même… Mais il se rappela soudain avec amertume l’aveu de Marguerite, l’énergie farouche, l’audace qu’elle avait mise à déclarer son amour pour ce Français de malheur de même que le dédain qu’elle n’avait pas caché à l’égard de