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LE FRANÇAIS

Cependant le « cookie » ayant mis devant lui son grand tablier de toile jaune, retroussa ses manches de chemise jusqu’au dessus des coudes et, commençant en-dessous du cou de l’animal, fendit la peau tout d’un trait ; après quoi les jeunes gens s’arqueboutant solidement de chaque côté du fauve, tirèrent la peau qui décollait avec le bruit d’une bande d’indienne qu’on déchire. Quand la fourrure fut enlevée, de quatre vigoureux coups de hache à équarrir, le père Phydime détacha les pieds de l’animal, lui guillotina la tête d’un autre coup sec, tranchant, au point que pendant quelques secondes, le sang hésita à couler. Un autre coup de couteau entré profondément dans la chair bleuie de la bête, et la voilà éventrée, vidée, soulagée. Ce fut de la bonne besogne, et propre. Il ne restait plus qu’à dépecer. Une âcre senteur de bois de résineux qui pétille dans le poêle mêlée à l’odeur écœurante du sang et des tripes de la bête éventrée s’est répandue dans tout le campe. De ses mains agiles et rouges, le père Phydime découpe en morceaux les flancs et le dos de la bête, enlève les quartiers de derrière, détache les filets rouges vif et les côtelettes nettes de sang. Les aides, attentifs, emportent les morceaux qu’ils jettent dans des plats sur la table…

« Dommage qu’on soit si loin d’nos blondes, hein, Jacques ? » fait Charles Castonguay, en soupesant un cuissot, « c’qu’on leur ferait un beau présent !… »

«  J’y pense, va, Charlie », répond Jacques Duval avec un grand soupir… « C’est moi qui m’passerait bien de cette venaison-là si cet exécrable de temps