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nadienne :

Si tu vois mon pays,
Mon pays malheureux ;
Va dire à mes amis
Que je me souviens d’eux.

Pauvre rêve !… rien ne reste de lui que le souvenir gravé au fond du cœur du jeune homme. Que n’as-tu vécu longtemps, que n’as-tu duré toujours, ô pauvre rêve éphémère, pour consoler dans son exil le petit Canadien !…

Ce n’était donc pas la voix de Jeanne que Paul avait entendue ; c’était celle d’une jeune compatriote, exilée, comme lui, et qui, dans un chant du pays, s’efforçait de faire revivre en son âme, les jours envolés de ce temps des violettes et des roses, le temps de la jeunesse…

Maintenant, Paul, rentré dans la réalité, s’efforce de l’adoucir, et il se sent aimer cette jeune inconnue qui lui avait fait revivre, un moment, des choses si suaves. Il se la représente avec de grands yeux bleus, tristes et rêveurs, avec de longues tresses de cheveux bruns, avec un esprit orné par une bonne éducation de famille, comme Jeanne. Il la voit, rêvant au pays, à l’ancienne maison, au village, déterrant tous les chers souvenirs cachés, là-bas, à l’ombre des vieux murs… Peut-être était-elle née sur une de ces plages où viennent déferler les vagues du beau Saint-Laurent, et, à cette heure, où elle chantait :