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quais du Havre, en quête d’ouvrage, que s’adressait cette interpellation d’un gros homme à casquette galonnée.

— Et pour qu’est-ce que c’est ? demanda Paul.

— Un des steamers de la Compagnie « White Star », répondit l’homme, doit partir ce soir pour New-York, or, il lui manque un chauffeur qu’on m’a chargé de chercher. Je suis officier de service à bord de ce navire. Voulez-vous vous embarquer avec nous ? Vous aurez $7.00 pour la traversée. À New-York, vous serez libre de revenir ou de rester. Ça vous va-t-il ?

Oui, ça lui allait, et sans plus de réflexion. Comme les aspects de la vie changent vite ! Hier, encore, il lui semblait presque impossible de retraverser cette mer pour s’en aller sur le continent où, au moins, vivaient les seuls êtres qu’il connût et aimât, et voilà qu’on brisait d’un seul coup tous les obstacles matériels qu’il croyait s’opposer à son retour en Amérique ; voilà qu’on lui laissait entrevoir la perspective de la revoir, cette terre où demeuraient ses parents. Sans doute, à New-York, il serait loin encore du foyer, mais il ne mettrait pas de temps à le rejoindre : non, maintenant, il y était décidé, c’était fini de la vie d’exil… Il aurait $7.00 en débarquant ; encore quelques jours de travail, quelques privations, et il aurait