Tout est calme. Le lourd Poustiakoff et sa lourde
moitié ronflent dans le salon. Gvozdine, Bouianof,
Pétouchkof et Flianof, un peu souffrant, se reposent
sur des chaises, dans la salle à manger. Monsieur
Triquet, en camisole et en bonnet de nuit, s’est fait
un lit sur le plancher. Les jeunes filles se sont partagé
les chambres de Tatiana et d’Olga. Tout le
monde est plongé dans un sommeil calme et profond.
Seule, Tatiana ne dort pas : assise près de la
fenêtre, elle regarde tristement la campagne sombre.
La soudaine apparition d’Eugène, la tendresse qui
avait un instant fait briller ses yeux, son étrange
conduite avec Olga, tout cela a bouleversé l’âme
de la jeune fille. Une angoisse jalouse l’oppresse ;
il semble qu’une main glacée lui serre le cœur, et
qu’un gouffre béant s’entr’ouvre et gronde sous ses
pas… « Je vais mourir, » dit-elle, « mais la blessure
qui me vient de lui m’est chère ; je ne murmure
pas : il ne peut me donner le bonheur ! »
Pressons-nous, mon petit livre, un nouveau personnage nous appelle !
À cinq verstes de la Montagne-Rouge où se trouve la campagne de Lensky, demeure et vit, en bonne