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Page:Pougy - Idylle saphique, 1901.djvu/121

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IDYLLE SAPHIQUE

demi-mondaine si connue, si commentée… en ce lieu, à cette heure, et pour un pareil motif !

Nhine poursuivait :

— Vous ne croyez donc à rien ?… Si… Alors, levez les yeux, priez… vous êtes riche, mariée, respectée et vous pleurez un vice qui s’en va !… Ah ! vous ne connaissez pas votre bonheur !

Elle lui contait sa vie, ses rancœurs, ses déceptions… Persuadée, Jane revint à elle, complètement… Elle se sentait réconfortée, un grand calme renaissait en elle, doucement, ainsi qu’après une tempête l’apaisement se produit. Elle sécha ses yeux et pensa à réparer le désordre de ses cheveux.

— De la poudre ? et Annhine lui tendit la boîte de cristal et d’or.

— Merci. Ah ! que vous êtes bonne ! Merci… elle embrassa Nhine, furieusement. C’était une ardente, une passionnée, excessive en tout. Elle la serra dans ses bras au point de lui faire mal. Ah ! je comprends qu’on vous aime, tenez ! Si douce !… Une petite courtisane si pure, au fond, et sans la moindre perversité… une vraie petite âme ! Je veux être votre amie ! Et moi qui vous croyais… Oh ! non, passons !… Je veux vous empêcher de tomber dans le désordre de ce vice que vous ne connaissez pas,… car vous ne sauriez me mentir, n’est-ce pas… ?

En un doute soudain, elle s’exaltait encore, dévisageant Annhine de son œil subitement assombri et scrutateur.