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Page:Pougy - Idylle saphique, 1901.djvu/15

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IDYLLE SAPHIQUE

craindre le moindre reproche ou blâme, car rien ne la touche !… Elle est en dehors de la Société et de ses mesquineries… Montrée au doigt ? Peut-être autrefois, mais plus de nos jours ! Rebelle victorieuse !… Fi de la Dame aux Camélias, et vivent les Aspasie et les Impéria !… Allons, petite courtisane de pâte tendre, ramène à terre la folle du logis qui chez toi s’égare et t’entraîne. N’as-tu pas de l’or dans tes cheveux ? Dans tes coffres ?… et l’or c’est notre Soleil à nous… soleil adorable et tout-puissant que nous pouvons fixer ou répandre à notre gré ! N’as-tu pas du ciel dans tes yeux ? Des perles à ton cou et dans ta bouche rose ?… Tu es délicieuse dans ton peignoir de capucin… Ce qui me charme le plus en toi, c’est ton androgynéité… Ne philosophons plus, jouons ! Place le capuchon sur ta tête… tu es exquise ainsi, Annhine… un vrai bijou… un moine Louis XV en miniature, frais et bouclé ! Annhine ! Ris donc ! Lève les yeux vers le ciel et prends un air inspiré en me donnant ta bénédiction… non, non… pas de bas, Ernesta, ni de mules, vous allez tout gâter… les pieds nus sur le tapis blanc, c’est ravissant ainsi, tes petits pieds pâles, aux longs doigts, aux ongles transparents. Peste ! mon beau cordelier, vous avez certainement une habile manucure !… Viens que je t’embrasse !… Et puis… sa voix se fit grave soudain… mon Père, je veux me confesser…

Elle se laissa glisser aux genoux du mignon reli-