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Page:Pougy - Idylle saphique, 1901.djvu/186

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IDYLLE SAPHIQUE

— Cachez bien les journaux surtout ! Il ne faut pas que madame soit au courant !

On apportait des fleurs — une gerbe mauve et triste, endeuillée d’un ruban de crêpe — comme une espérance, on y avait ajouté un imperceptible nœud de satin vert. Altesse la saisit et ouvrit l’enveloppe qui était jointe. Elle chercha la signature et vit :

— Encore cette folle !… Ah ! non ! par exemple !

La lettre disait :

Quand, rappelée aux douloureuses choses d’ici-bas et surtout de l’heure présente, je vais par les rues, il me semble que les fleurs mêmes s’étonnent de me trouver encore vivante et qu’elles me demandent comment il se fait que je puisse parfois sourire. Elles ne comprendront jamais pourquoi malgré tout je marche presque joyeusement dans la vie. Alors, sans rien leur répondre, je les envoie vers la cause de mon bonheur, vers ma chère sœur de rêves. Elles me précéderont d’une heure — j’irai prendre de tes nouvelles dans la matinée. Séparée hier si brusquement et si fatalement de toi, il faut que je te parle de tant de choses !

Ton Moon-Beam.

Tesse déchira la missive en menus morceaux.

— Mettez cela où vous voudrez, il faut que Madame ne soit absolument dérangée en rien, ni par personne surtout. Vous direz qu’elle est absente et pour un long temps. Ne recevez que le docteur.

Justement le médecin venait. Il examina la malade.