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Page:Pougy - Idylle saphique, 1901.djvu/235

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IDYLLE SAPHIQUE

— Merci… et Tesse le fixa doucement en lui pressant la main.

Une demi-heure après, il revint avec le docteur. Altesse mit ce dernier au courant de la chose et, s’excusant auprès de Régis qui prit congé, elle frappa à la porte d’Annhine. Comme elle ne recevait pas de réponse, elle entra et trouva son amie en pleurs. Les pleurs d’Annhine étaient sa plus grande séduction, car ses traits ne se contractaient point, ses yeux s’ouvraient, larges, s’agrandissaient, les larmes jaillissaient, roulant lentement le long des joues.

— Qu’as-tu, mignonne ?

— Je ne sais pas, je ne sais pas !… et, apercevant le docteur, Nhine se cacha le visage.

— C’est monsieur de Gastier qui vient faire connaissance avec sa petite malade. Vous tombez bien, docteur, je crois, dit Tesse, on est nerveux…

Nhine se redressa, elle essuya ses yeux et se prêta gentiment à un minutieux examen, contant son mal doucement et sans phrases. Il souriait, amical, intéressé et charmé par la beauté attirante de la jolie créature. Elle observait cet homme, jeune et robuste, sain et fort, qui l’interrogeait et quelque chose d’étrange, d’anormal se passa alors en elle ; elle éprouvait un impérieux besoin de se donner, d’être prise, brutalisée, violée, ses mains se crispèrent, elle sentit un désir violent, imprévu qui la livrait à l’homme, au mâle qu’elle voyait près d’elle. Ses oreilles bourdonnaient, sa bouche devenait