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Page:Pougy - Idylle saphique, 1901.djvu/249

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IDYLLE SAPHIQUE

qu’il reviendrait un de ces jours, bientôt, sitôt que cela lui serait possible. Annhine resta décontenancée… c’était dommage !

Le lendemain matin il neigeait. Personne n’irait au Bois d’un temps pareil. Chic !… Elle voulût y aller très tôt, s’enveloppa d’une jaquette d’hermine, en harmonie avec la blancheur d’ouate qui tombait, silencieuse et envahissante. Qu’elle aimerait cela, marcher dans la neige !… Elle se coiffa d’une toque, d’hermine aussi, ses petits pieds étaient protégés par de mignons snow-boots, une jupe de drap noir, collante, qu’elle relevait gentiment, découvrait le bas de la jambe fine et nerveuse. Elle trottait très vite par les allées désertes et claires, le nez au vent, toute rose de la bise qui lui pinçait les joues, le teint animé, les yeux vifs, suivie de Princesse couverte d’une pelisse de fourrure assortie à celle de sa maîtresse. Tout à coup, elle aperçut un cavalier solitaire qui s’en venait. Elle reconnût Maurice.

— C’est drôle, lui dit-elle avec un sourire, alors qu’il s’approchait en saluant, il n’y a que deux êtres dans le Bois, ce matin, et il faut que ce soit nous !

— C’est un hasard que je bénis, répondit-il mais ne vous arrêtez pas, vous allez prendre froid. Continuons, je vous suivrai lentement.

— Je suis en angora, dit-elle, je ne crains rien, mais vous êtes bien imprudent !

— Dites que j’ai été bien inspiré ! Le dimanche, c’est mon jour de liberté, de vacances, comme aux