Page:Prévost - Histoire d’une Grecque moderne (Flammarion, 1899), tome I.djvu/144

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m’ayant répété qu’elle avait besoin de repos, j’expliquai cet avertissement comme une déclaration modeste de l’impatience qu’elle avait de se voir libre avec moi. Je m’applaudis même de trouver tout à la fois dans une aimable maîtresse assez de vivacité pour souhaiter impatiemment l’heure du plaisir et assez de retenue pour déguiser honnêtement ses désirs.

Mes domestiques, qui m’avaient vu faire plus d’une partie d’amour dans ma maison d’Oru, et qui n’avaient ordre d’ailleurs que de préparer un lit, avaient disposé dans le même appartement tout ce qui était nécessaire à la commodité de Théophé et à la mienne. Je l’y conduisis avec un redoublement de joie et de galanterie. Son esclave et mon valet de chambre, qui nous y attendaient, s’approchèrent pour nous rendre chacun de leur côté les services de leur condition, et j’exhortai en badinant Bema (c’était le nom de l’esclave) à ne pas s’attirer une haine par un excès de lenteur.

Il m’avait semblé jusqu’alors que Théophé était entrée naturellement dans toutes mes vues, et je la crus si disposée à la conclusion de cette scène, que je n’avais jamais pensé à couvrir mes espérances du moindre voile. Ce n’était point avec une femme qui m’avait raconté si ouvertement ses aventures de Patras et celles du sérail, que je me croyais obligé de prendre les détours qui soulagent quelquefois la modestie d’une jeune personne