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Page:Prévost - Histoire d’une Grecque moderne (Flammarion, 1899), tome II.djvu/59

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faisait crier au postillon d’arrêter. Il retint enfin ses chevaux. Je modérai les gens du Sélictar, qui continuaient de maltraiter le jeune esclave, et je donnai ordre qu’on le fît approcher.

Le Sélictar ne comprenait rien à cette scène, ni à l’attention que j’y donnais. Mais les explications du chevalier lui apportèrent bientôt les lumières que j’avais déjà. Ce malheureux jeune homme se fit assez de violence pour reprendre la respiration qui lui manquait, et, prenant sans affectation l’air qui convenait à sa naissance, il m’adressa un discours que je m’efforcerai de rendre aussi touchant qu’il me le parut dans sa bouche. Après m’avoir fait en peu de mots son histoire et celle de sa maîtresse, il s’aperçut au moment qu’il voulait me la faire connaître, qu’elle était sans mouvement auprès de moi.

« Ah ! vous la voyez ! s’écria-t-il en s’interrompant avec un nouveau trouble ; elle se meurt, reprit-il encore, et vous ne la secourez pas ! »

Il n’était pas difficile de lui faire rappeler ses esprits. La joie ne sert qu’à ranimer les forces quand elle ne les a point étouffées dès le premier moment.

Elle se tourna vers Théophé :

« C’est lui ! s’écria-t-elle ; ah ! c’est le chevalier ; c’est lui-même ! »

Je n’avais pas besoin de cette confirmation pour m’apprendre ce que j’en devais croire.