Aller au contenu

Page:Prévost - Histoire d’une Grecque moderne (Flammarion, 1899), tome II.djvu/68

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

la délicatesse de cette négociation ; on se flattait qu’avec le secours de Maria Rezati, qui était entrée ardemment dans ce glorieux projet, on lui ferait entendre que, soit qu’elle fût fille de Paniota Condoidi, soit qu’elle prît les sentiments d’amour pour Synèse, elle n’avait rien à souhaiter de plus heureux pour une fille du même pays.

Quoique le chevalier m’eût laissé quelque défiance, elle se tournait si peu vers Synèse et sur mes propres intérêts, que ne voulant pas pénétrer plus loin qu’il ne souhaitait dans les siens, je ne fis point la moindre objection contre son dessein.

« Le prix de votre liberté, lui dis-je, n’est pas ce qui doit vous causer de l’inquiétude, et je ne regretterais pas plus une grosse somme, si elle pouvait contribuer à votre bonheur. »

Cependant je m’imaginai que le fond de cette nouvelle intrigue ne serait point échappé à Théophé. Je brûlais d’ailleurs du désir de la revoir. C’était une impatience si vive que les trois jours que j’avais été obligé de passer à la ville m’avaient paru d’une mortelle longueur ; et qu’en faisant quelquefois une réflexion sérieuse sur l’état de mon cœur, j’avais quelque confusion de lui avoir laissé prendre sur moi tant d’ascendant. Mais étant convenu avec moi-même de me livrer à une passion dont j’espérais toute la douceur de ma vie, j’écartais tout ce qui aurait pu diminuer la force d’un sentiment si délicieux.