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Page:Prévost - Histoire d’une Grecque moderne (Flammarion, 1899), tome II.djvu/71

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je lui abandonnais le choix des marques.

Je revins d’un air plus tranquille, après m’être soulagé par cette ouverture, et je priai froidement Théophé de passer seule dans son cabinet. Elle y demeura quelques instants. Reparaissant ensuite avec une contenance fort sérieuse, elle me supplia de retourner au lieu d’où elle sortait.

Au-dessous de mon écrit, j’en trouvai un de sa main. Il était si court et d’un ton si extraordinaire, qu’il n’a pu me sortir de la mémoire.

« Une misérable, me disait-elle, qui avait appris de moi le nom de l’honneur et de la vertu, et qui n’était pas encore parvenue à connaître celui de son père, l’esclave du gouverneur de Patras et de Chériber, ne se sentait propre qu’à inspirer de la pitié ; ainsi, elle ne pouvait se reconnaître dans l’objet de mes autres sentiments. »

Il m’échappa une exclamation fort vive en lisant cette étrange réponse. La crainte qu’il ne fût arrivé quelque accident la fit accourir à la porte du cabinet. J’étendis les bras vers elle, pour l’inviter à venir recevoir mes explications ; mais quoiqu’elle remarquât ce mouvement passionné, elle retourna vers sa compagne, après s’être assurée qu’elle n’avait rien à craindre pour ma santé.

Je demeurai en proie aux plus violentes agitations. Cependant ne pouvant abandonner mes espérances, je repris la plume pour effacer l’horrible portrait qu’elle avait