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Page:Prévost - Histoire d’une Grecque moderne (Flammarion, 1899), tome II.djvu/73

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propre qu’à jeter des flammes dans un cœur, devenait par cette raison même, la plus capable d’imposer de la crainte et du respect, lorsqu’au lieu d’y trouver la facilité que tant de charmes faisaient désirer et que tant de grâces semblaient promettre, on était non seulement arrêté par la crainte de déplaire, qui est un sentiment ordinaire à l’amour, mais comme repoussé par la décence, l’honnêteté, par l’air et le langage de toutes les vertus, qu’on ne s’attendait pas à trouver sous des apparences si séduisantes. Vingt fois, dans les principes de droiture et d’honneur qui m’étaient naturels, je pensai encore à me faire violence pour laisser un cours libre aux vertueuses inclinations de Théophé ; mais emporté par une passion que mon silence et ma modération même avaient continuellement fortifiée, je revenais à promettre au Ciel de me contenir dans les bornes que je m’étais imposées, et je croyais donner beaucoup à la sagesse, en me soutenant dans la résolution de ne demander à Théophé que ce qu’elle serait portée volontairement à m’accorder.

Je passai assez tranquillement le reste du jour dans l’attente de cette nouvelle réponse qu’elle avait voulu se donner le temps de méditer, et je ne cherchai point l’occasion de lui parler sans témoins. Elle parut l’éviter aussi. Je remarquai même dans ses yeux un embarras que je n’y avais jamais aperçu.