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Page:Prévost - Histoire d’une Grecque moderne (Flammarion, 1899), tome II.djvu/88

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vous fermer les yeux, je n’ai pas de regret qu’ils soient ouverts, et je vous avertis seulement qu’ils vous trompent s’ils vous font mal juger de mon amitié et de ma bonne foi. »

Ce discours diminua l’emportement du Sélictar, mais il ne refroidit point toute sa chaleur.

« Quoi ! me dit-il, vous ne m’avez pas dit que vous n’en étiez qu’aux termes de l’amitié avec Théophé, et que la générosité était le seul sentiment qui vous avait intéressé pour elle ? »

Je l’interrompis sans émotion.

« Je ne vous ai pas trompé, si je vous ai tenu ce discours ; c’était mon premier sentiment, lui dis-je, et je ne serais pas si content de mon cœur, s’il avait commencé par un autre ! Mais puisque vous me pressez de vous apprendre ce qui s’y passe, je vous avoue que j’aime Théophé, et que je n’ai pu me défendre mieux que vous contre ses charmes. Cependant je joins à cet aveu deux circonstances qui doivent vous remettre l’esprit : je n’avais pas ces sentiments pour elle lorsque je l’ai tirée du sérail de Chériber, et il ne me sert pas plus qu’à vous de les avoir conçus depuis.

« Voilà, repris-je avec moins de fierté que de politesse, ce que je crois capable de satisfaire un homme que j’estime et que j’aime ! »

Il se livrait, pendant ce temps-là, aux plus noires réflexions, et rappelant tout ce qu’il avait remarqué dans notre commerce depuis