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Page:Prévost - Histoire d’une Grecque moderne (Flammarion, 1899), tome II.djvu/92

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Ce bonhomme se chargea volontiers de sa commission. Il me l’expliqua d’un ton badin ; et redoublant l’admiration qu’il avait déjà pour une fille si extraordinaire, il me demanda si je mettais beaucoup de différence entre cette vertueuse crainte et celle qui portait un caloger modeste à se cacher pour fuir les dignités ecclésiastiques. Je ris de sa comparaison. Avec un peu plus d’expérience que lui de la vanité et de l’adresse des femmes, toute autre que Théophé m’aurait été suspecte, et j’aurais peut-être regardé cette apparence de modestie comme un tour fort bien imaginé pour me faire connaître ses prétentions. Mais j’aurais fait le dernier outrage à mon aimable élève.

« Elle n’avait pas besoin de cette précaution, dis-je au caloger, pour me faire bien juger des sentiments de son cœur, et dites-lui plus d’une fois que s’il m’était libre de suivre les miens, je ne tarderais guère à lui marquer toute la justice que je lui rends. »

C’était la seule réponse qui convînt à ma situation. Oserai-je confesser qu’elle était bien plus retenue que mes véritables désirs ?

Je ne manquai pas de tenir le même langage à Théophé, et je fus comme forcé de la poursuivre pour trouver l’occasion de l’entretenir sans témoins. Je m’étais retranché les visites que je lui rendais seul dans son appartement. Je ne lui proposais plus de promenade au jardin. Elle m’était