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Page:Pradez - La Revanche du Passé, 1900.djvu/27

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muette s’était brusquement transformée en un élan de gratitude. Mais cette gratitude tardive, impuissante, aux dessous très poignants, ne lui apportait qu’un surcroît de chagrin, et elle se débattait contre des souvenirs, redevenus très vivants, et dont le langage avait pris tout à coup un autre sens.

Et comme pour souligner ce retour amer vers un irréparable passé, elle venait, dans cette grande glace limpide, de surprendre sur le visage maladif d’Élisabeth un air décidément soupçonneux et froid.

Elle fut reprise du désir de la questionner, de découvrir coûte que coûte la cause secrète qui désorganisait ainsi lentement leur intimité, de forcer Élisabeth à parler sans détour, pendant cette journée où elles semblaient plus près l’une de l’autre ; mais en jetant les yeux sur sa fille, elle changea d’avis. Élisabeth avait repris un air naturel, et la mère remit son interrogatoire à plus tard. Elle glissa un bras autour de la taille maigrelette, réfléchit quelques secondes, et dit :