Page:Pradez - Les Ignorés.djvu/118

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
112
les ignorés

vitres une ombre noire, une grande silhouette masculine qui passa sans s’arrêter.

Catherine bondit aussitôt sur ses pieds. Une sueur glacée perlait à ses tempes, et cependant elle éprouvait une sorte de soulagement d’échapper enfin à l’angoisse vague qui la torturait. Tout valait mieux que de se ronger l’esprit, en proie à cette mortelle inaction.

Elle fit un pas du côté de la porte et cria d’une voix stridente :

— Qui va là ?

Autour du loquet, une main travaillait avec une excessive précaution, comme si le visiteur nocturne, au courant des habitudes de Jérôme et de Catherine, s’attendait à voir la porte céder sans résistance.

Il y eut quelques secondes de silence absolu, puis une voix jeune mais étoufiée, répondit :

— C’est moi !

Catherine courut tirer le verrou. Elle se trouva face à face avec son beau-fils, trempé jusqu’aux os après sa longue course pénible au travers de la neige. Elle le regarda un moment, tellement stupéfaite et encore si tremblante de sa récente frayeur, qu’elle ne trouvait rien à lui dire. Elle murmura enfin :

— Qu’est-ce que cela veut dire ?

Et tout de suite, elle eut la pensée que Jules désirait lui parler secrètement en l’absence de son père. Cela lui déplut. Elle reprit :

— Tu viens, parce que tu sais que ton père n’est