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avait enfermé ses réprimandes. Il me parlait comme à un être raisonnable avec lequel on peut discuter. Mais, moi, je ne possédais point d’argument plausible à faire valoir. Je n’avais rien de précis dans l’esprit, si ce n’est la certitude, qui ne m’a jamais quittée depuis, que Lucien était parti contre son gré.

Je restai un instant assommée, stupide de chagrin. Cette conviction qui m’écrasait le cœur, il fallait donc, sous peine de cesser de ressembler à maman, la taire, la cacher, l’enfouir dans le silence ! Je m’écriai enfin, suffoquée :

— Je veux faire comme maman…

Et en sanglotant, je me jetai dans les deux bras ouverts pour me recevoir.

Je me cramponnais à papa de toutes mes forces et je l’inondais de mes larmes. Avec des caresses, il essayait de me calmer. Il pressait ma tête brûlante contre sa joue, et dans une de ses mains il serrait les deux miennes, il les écrasait dans une étreinte étroite, mais il ne disait rien, pas un mot.

À la fin, il me prit la figure dans ses mains, me baisa le front à plusieurs reprises en murmurant à voix basse :

— Mon enfant !… mon enfant !…